Les Français en Chine : Le visa travail
Bonjour à toutes et à tous ! Je m’appelle Juliette, je suis bénévole dans l’association Mon Ami Français depuis Septembre 2021. Étant sinophone et intéressée par le marché chinois, il était normal pour moi de prendre part aux activités d’une association comme Mon Ami Français « MAF ». Nous nous focalisons ces derniers mois sur la question du droit du travail en France pour les travailleurs chinois. Lors d’une réunion, je me suis posée cette question : « Qu’en est-il des Français qui souhaitent travailler en Chine ? Quelles sont les démarches ? ». J’entendais beaucoup de choses autour de moi, j’ai donc contacté Thomas Larno-Longo qui a gentiment pris le temps de répondre à mes questions. En espérant que cela vous éclairera !
Bonjour Thomas, pouvez-vous vous présenter en quelques mots ? Qui vous êtes, ce que vous faites, depuis combien de temps êtes-vous en Chine ?
Bonjour Juliette, je suis en Chine depuis un peu plus de deux ans maintenant. Je travaille en ce moment en tant que « manager », mon rôle est principalement de superviser et d’améliorer la collaboration entre les équipes locales et internationales. De servir de lien et parfois d’intermédiaire entre les différents investisseurs étrangers et les équipes de management général.
J’ai cru comprendre que c’est à la suite d’un échange à la Shandong University of Art à Jinan que vous avez trouvé votre premier travail en tant que consultant pour P.Art Center, comment avez-vous trouvé ce poste, avez-vous des astuces à partager pour trouver plus facilement un travail en Chine ?
J’ai trouvé mon premier emploi par chance ; en demandant mon chemin dans la rue. Après une brève conversation puis une visite d’atelier, j’ai aidé l’équipe pour un projet d’exposition sur lequel ils travaillaient à ce moment-là et on m’a fait une offre d’emploi directement après.
La maîtrise de la langue a toujours été un avantage décisif pour toutes les offres d’emploi que j’ai reçues en Chine… C’est sans doute aussi lié à mon parcours : Je sais pas. Par exemple, pour certains postes notamment d’ingénieurs dans l’industrie ce n’est pas vraiment un critère qui rentre en compte.
Pour chercher du travail en Chine, à mon avis la méthode la plus efficace est d’utiliser son réseau personnel. Beaucoup d’offres d’emploi ne sont jamais vraiment rendues publiques, le monde professionnel repose beaucoup sur le bouche à oreille.
Pensez-vous que le fait de parler le mandarin et de pouvoir justifier d’un certain niveau peut aider à l’obtention de ce visa lorsqu’on est étranger ?
Parler le mandarin (dans mon cas) est une aide immense pour trouver un travail dans une entreprise stable, qui a suivi toute les formalités pour employer des étrangers. Mais pour ce qui est du processus d’application pour le visa en tant que tel je n’ai pas remarqué que cela m’a aidé. Je dirais donc que c’est une aide, mais de façon indirecte.
Je voudrais maintenant aborder avec vous le processus d’obtention du visa travail lorsqu’on est Français en Chine. Pouvez-vous nous en dire plus sur comment se sont passées les démarches pour vous ? Vous êtes-vous fait aider ? Est-ce difficile ? Combien de temps cela vous a pris ?
Globalement, c’est très compliqué et difficile. Le processus m’a pris entre un et deux mois pour un visa étudiant et plus de 3 mois pour un permis de travail et le «visa travail » (Resident Permit work) associé. Pour la plupart de mes premiers visas (visa étudiant, visa T « 停留 ») j’ai fait les démarches moi-même. Pour ce qui est des visas travail il faut (à ma connaissance) obligatoirement qu’un employé chinois (en utilisant sa carte d’identité) fasse les demandes sur le site du bureau des experts étrangers. L’un de mes employeurs a aussi jugé nécessaire d’avoir recours à l’aide d’un expert du système juridique local (agent) lors de ma deuxième demande de visa.
Avez-vous constaté depuis le début de la crise COVID-19, un durcissement des règles permettant d’obtenir un visa travail ? J’imagine que cela ne devait pas être simple déjà lorsque vous êtes venu en échange pour la première fois en 2019.
Oui. J’ai aussi changé de lieu de résidence donc il m’est difficile de savoir quelle part des nouvelles difficultés sont liées aux pratiques locales en matière d’immigration. Mais oui, il y a un très net durcissement des règles et conditions pour obtenir un visa travail.
J’ai entendu des témoignages dans mon entourage proche disant qu’une fois le « précieux sésame » obtenu, il arrive qu’il ne soit pas renouvelé à expiration. Pensez-vous que cela est dû à un quota établi par le gouvernement ?
Je pense qu’il y a des quotas en effet établis par les gouvernements locaux, à ma connaissance ce n’est pas officiellement admis. Cependant il semblerait que cela soit le cas. De nombreuses personnes n’ont pas eu la possibilité de renouveler leur visa travail (ou même visa étudiant) cette année.
En tant que Director of Foreign Teacher Management Center, et en s’appuyant sur le système de point et de lettre mis en place en 2017 pour l’obtention du permis travail, quel statut vous a été attribué (A, B ou C) et quels sont les avantages liés à celui-ci ?
Lors de mes deux applications pour le visa travail les contacts au sein du Bureau départemental des experts étrangers (State Bureau of Foreign Experts) nous ont dit que le système de points n’était plus appliqué dans cette juridiction… Cependant ma carte d’expert étranger (« Foreign Expert’s ID » ou 外国人来华工作许可) est estampillé « B ». Je dirais donc que si le système de points n’est plus appliqué (?) les principes sur lequel il repose restent de bons indicateurs pour les chances de succès.
En lisant des articles sur le sujet, je me suis rendu compte que pour obtenir ce fameux visa travail « visa Z », il fallait avoir au moins 2 ans d’expérience professionnelle cumulée, sans compter les stages. Comment êtes-vous passé au travers des mailles du filet ? Est-ce le fait que vous soyez diplômé d’un master des Beaux-Arts de Bretagne ?
Je pense que d’une part mes expériences d’échanges internationaux ont été mises en valeur. Je n’ai aussi pas eu de visa Z qui permet d’entrer sur le territoire pour travailler, je suis rentré sur le territoire avec un visa étudiant X. Ensuite j’ai obtenu ma carte d’expert étrangers et un permis de résidence (« visa travail ») alors que j’étais déjà sur le territoire. Je pense qu’il est important de mentionner cette différence. D’autre part la pièce maîtresse de mon dossier a toujours été la «lettre d’explication des circonstances » (“情况说明”) cette lettre, les documents et les preuves nécessaires associées m’ont permis d’obtenir le visa travail. Dans mon cas, mes capacités linguistiques convenaient parfaitement aux besoins de l’entreprise pour laquelle j’allais travailler, et donc le fait que je sois capable de parler mandarin, français, anglais et coréen a permis de pousser ma candidature.
Pour être honnête c’est malheureux mais je pense que le master des Beaux-Arts ne m’a pas particulièrement aidé dans le cadre de mes demandes de visa.
Vous me disiez lors de notre première prise de contact que vous suiviez en ce moment une formation dans l’analyse de données. C’est un domaine très recherché en Chine et une compétence mise en avant par le gouvernement chinois qui pourrait faciliter une demande de visa travail. Avez-vous choisi de vous orienter dans ce domaine par intérêt pour la chose ou plutôt parce que vous pensez qu’il est indispensable d’avoir cette compétence de nos jours, notamment pour le renouvellement d’un visa travail dans votre cas ?
Je ne pense pas que cette formation en particulier puisse me donner un avantage pour une demande de visa travail étant donné que ce n’est pas un diplôme reconnu par l’État Chinois. En revanche je pense qu’elle complète relativement bien les différentes formations que j’ai suivi et mon expérience personnelle, et qu’à l’avenir ce type de compétences pourraient m’être utile pour développer ma carrière. Étant donné mon expérience personnelle je pense qu’avoir un assortiment de compétences relativement rares et qui se complètent qui peut justifier l’emploi d’un « expert étrangers » c’est ; pour mon cas , je pense, la meilleure façon d’assurer l’obtention de la carte d’expert étrangers et le renouvellement du permis de séjour travail (Residence Permit work).
Nous arrivons à la dernière question ! Quels conseils pouvez-vous donner à une personne qui souhaiterait venir travailler en Chine ?
Pour être honnête je pense que je conseillerai d’attendre des conditions plus favorables. En ce moment les conditions d’entrée/ sortie du territoire pour les étrangers sont extrêmement restrictives ; le renouvellement des permis de séjours est extrêmement complexe, lent, cher et hasardeux (d’après les retours que j’ai eus), pour ces raisons je conseillerai donc d’attendre.
Ensuite évidemment je conseillerai l’apprentissage du mandarin, idéalement sur place en immersion.
Dernièrement je conseillerai de développer activement votre réseau de connexions professionnelles particulièrement de conserver le Wechat et le numéro de téléphone des personnes rencontrées durant des dîners d’affaires même informels.
En résumé :
- Trouver un travail en Chine grâce au bouche à oreille est très courant, la maîtrise du mandarin est un bon moyen d’augmenter ses chances. Conserver le Wechat de personnes rencontrées même lors d’occasions informelles permet de développer son réseau.
- Le processus d’obtention du visa travail est long et compliqué : il est mieux de se faire aider par un local comme un expert juridique mandaté par l’entreprise.
- Le système de point n’est officiellement plus appliqué même si les principes sur lequel il est appliqué subsistent encore officieusement.
- Une lettre d’explication des circonstances délivrée par l’employeur permet dans certains cas de passer outre la règle des 2 ans d’expériences. Avoir des compétences rares et qui se complètent permet d’obtenir plus facilement le statut “d’expert étranger”
- Avec la crise du COVID et le durcissement des règles d’immigration en Chine, décaler sa date de venue en Chine est préférable.
Cela conclut cet entretien, j’espère que cet article vous sera utile. Un grand merci à Thomas pour les réponses apportées, bonne continuation pour la suite. Pour plus d’articles, n’hésitez pas à nous suivre sur les réseaux !
Rédactrice – Juliette LE BOULAIRE
Relecture – Diane JUSTIN | Mise en ligne – Feng QIU-FIELBAL
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